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Covid et management : si on essayait la confiance ?

Photo du rédacteur: Erwan HernotErwan Hernot

On est dans une drĂŽle de sĂ©quence : la COVID-19 a secouĂ© le systĂšme dans lequel nous vivons et travaillons. J'ai commencĂ© Ă  en prendre la mesure avec le livre blanc « Manager en temps de Covid : simple pĂ©ripĂ©tie au rĂ©volution culturelle ? » J'ai poursuivi la rĂ©flexion avec les 2 papiers « Covid et management : inventaire des inconvĂ©nients de la distance », « Covid et profil du manager : mettez Ă  jour et passez Ă  la V3 » disponibles sur https://www.clavaconsulting.com/blog . En voici un 3Ăšme qui profite de la pĂ©riode pour stimuler la rĂ©flexion managĂ©riale et penser l’aprĂšs Command&Control.


Le management Command & Control a gĂ©nĂ©rĂ© un systĂšme trĂšs prĂ©gnant aujourd’hui. Il n'est pas mauvais en soi ; c'est une gĂ©nĂ©ralisation abusive de son usage qui peut se rĂ©vĂ©ler toxique. Ses mots-clĂ©s sont familiers Ă  tous les salariĂ©s : mesures, contrĂŽle, formalisation, standardisation. PassĂ©e la phase pionniĂšre, les entreprises se structurent (presque) toujours en multipliant les Ă©chelons (les bureaucraties intermĂ©diaires) et les nomenclatures, procĂ©dures de contrĂŽle, fonctions support. Quand on arrive au niveau de l'encadrement de proximitĂ©, il ne reste pas grand-chose d’un pouvoir captĂ© par ces niveaux hiĂ©rarchiques, ces fonctions support, les rĂšgles gĂ©nĂ©rales et les processus centralisateurs qu’elles promeuvent. Cette standardisation a une logique : rendre les acteurs et les choses facilement sĂ©lectionnables, interchangeables, prĂ©visibles, reproductibles, mobiles et distribuables. Elle facilite la planification, la coordination, la spĂ©cialisation (et les silos), l'organisation et le contrĂŽle. Le standard est une technique pertinente, tant que l'environnement reste prĂ©visible. DĂšs les annĂ©es 1950, lorsque la concurrence s'affirme et que les entreprises s’étendent hors de leur pays d'origine, cette planification originelle est progressivement enrichie d’un usage plus large de la stratĂ©gie. Mais les schĂ©mas mentaux restent les mĂȘmes jusqu’à aujourd’hui : il s’agit toujours d’organiser les comportements des acteurs (1) en vue de rĂ©aliser une tĂąche prĂ©dĂ©finie au moyen de connaissances objectivĂ©es que sont les meilleures pratiques, les instructions, la conformitĂ©. En environnement imprĂ©visible, il y a une erreur de raisonnement dans le recours systĂ©matique aux processus. C'est le mythe de la clartĂ©. Il tient au fait que l'incertitude doit ĂȘtre maĂźtrisĂ©e. Les croyances Ă  la base du Command&Control sont d’ailleurs tellement intĂ©grĂ©es qu’on (les parties prenantes de l’entreprise) demande toujours Ă  un dirigeant d'avoir une stratĂ©gie claire non parce qu'elle est juste mais parce qu'elle apporte un sentiment de contrĂŽle ! On part du principe que « la rĂšgle dĂ©finit le jeu » (2) et que donc, les acteurs appliquent ce qu'on leur demande d'appliquer. Ils ne dĂ©ploient leur intelligence que pour se conformer Ă  ce qui a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©. Mais dans un environnement imprĂ©visible, ils sont prisonniers de cette rĂšgle et se dĂ©motivent rapidement car ils sont tenus responsables de rĂ©sultats sur lesquels ils n'ont pas beaucoup de prise. Plus il y a de rĂšgles, de procĂ©dures, de reportings etc. et plus le message envoyĂ© aux troupes, c'est « On ne vous fait pas confiance ». Ce manque de confiance est reçu 5/5 par les salariĂ©s : inutile de prĂ©ciser que ces conditions ne favorisent pas l’engagement. Quand les acteurs ne se sont pas concernĂ©s ou se sentent impuissants, leur insatisfaction produit du dĂ©sengagement, de la dĂ©fiance et un surcroĂźt de rĂ©sistance Ă  tout changement. A contrario quand ils se sentent impliquĂ©s et responsables : les acteurs peuvent devenir actifs, innovants. L’engagement s’est rĂ©veillĂ© d’ailleurs durant les premiers mois de la COVID (Livre Blanc ClavaConsulting « Manager en temps de Covid : simple pĂ©ripĂ©tie ou rĂ©volution culturelle ? ») par la force des choses : on n’avait jamais rencontrĂ© une telle situation... et les dirigeants et managers ont Ă©tĂ© obligĂ©s de faire confiance ;)


Ce premier signal (COVID-19) s’accompagne d'un 2Ăšme phĂ©nomĂšne dĂ©jĂ  familier : l’ùre numĂ©rique et ses disruptions. A environnement identique, une entreprise gagne en prenant de meilleures dĂ©cisions plus vite que ses concurrentes. C’est une meilleure information qui conduit Ă  de meilleures dĂ©cisions. En poursuivant l’analogie, le fonctionnement de l’entreprise peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un processus permanent de traitement de l'information: observer, transmettre, analyser, comprendre, dĂ©cider, stocker et prendre des mesures pour la mise en Ɠuvre. Il faut veiller Ă  crĂ©er une organisation dont la capacitĂ© de traitement de l'information corresponde aux exigences et contraintes gĂ©nĂ©rĂ©es par cet environnement. Dans les organisations hiĂ©rarchisĂ©es et tayloriennes, les informations circulent dans des canaux prescrits et restreints. Ajoutons une spĂ©cificitĂ© nationale : « l’intelligence humaine dĂ©finie Ă  la mode française est la capacitĂ© d'une Ă©lite rĂ©duite Ă  tout comprendre, tout contrĂŽler, tout maĂźtriser et finalement tout reformuler dans une impeccable logique formelle » (3). A cet Ă©gard, l’utilisation de modĂšles (de comportement, d'organisation etc.) se substitue souvent Ă  la connaissance de la rĂ©alitĂ©. Ces modĂšles apportent des solutions, donc ils rassurent. Ces solutions ne s'appuient toutefois jamais sur une connaissance du problĂšme mais sur des constructions a priori, sur des postulats rĂ©ducteurs ou sur des constats, qui, faits plusieurs fois, finissent par devenir des vĂ©ritĂ©s qui ne sont pas remises en question. C’est une fidĂ©litĂ© cachĂ©e Ă  la rationalitĂ© taylorienne. Or l’environnement est donc de plus en plus imprĂ©visible. « Plus l'incertitude de la tĂąche est grande, plus les demandes de traitement de l'information par les dĂ©cideurs sont importantes » (4). DĂšs 1973, Jay Galbraith identifiait ainsi les consĂ©quences de l’incertitude et thĂ©orisait alors la remontĂ©e des dĂ©cisions Ă  prendre, sur les dirigeants. On n’a pas beaucoup avancĂ© depuis. Est-ce toujours pertinent de traiter la majeure partie des infos Ă  ce niveau ? La transformation des produits en services, l’apparition de l’économie de plateforme et ses Ă©cosystĂšmes, remettant en cause des modĂšles d’affaires rĂŽdĂ©s depuis des dizaines d’annĂ©es, a complexifiĂ© la situation. Les collaborations inter-silos sont plus nĂ©cessaires et l'interdĂ©pendance entre les tĂąches plus grande: la capacitĂ© de traitement de l'information doit ĂȘtre au niveau. La vitesse et le volume de l'information caractĂ©risent l’ùre numĂ©rique. La relation entre cette vitesse, ce volume exponentiel d'informations et la performance de la prise de dĂ©cision devient problĂ©matique. La surcharge diminue les performances des dirigeants Ă  cet Ă©gard. On appelle alors Ă  la rescousse le leadership pour maĂźtriser la complexitĂ© de l'action collective. L'idĂ©e c'est que les qualitĂ©s des leaders compenseront l'absence de raisonnement construit sur le fonctionnement d’une organisation humaine et 
 remplacĂ© - jusqu’à prĂ©sent - par une ingĂ©niositĂ© Ă  trouver des moyens de mettre sous contrĂŽle ce que faisaient les uns et les autres. On sortirait donc du Command&Control avec un accent sur le leadership ? Sans doute mais c’est largement insuffisant. Comment aller plus loin ? Si le management Command&Control imposait, de l'extĂ©rieur, ses principes et ses rĂšgles, la situation idĂ©ale consisterait en une intĂ©riorisation individuelle du principe d'efficacitĂ© : chaque acteur intĂ©grerait les tenants et les aboutissants de sa mission, ses exigences et contraintes comprises, dans le cadre du modĂšle affaires de l’entreprise qu'il comprendrait. Pour y arriver, plusieurs conditions doivent ĂȘtre prises en compte.


Le manager n’est plus l’expert, c’est un gĂ©nĂ©raliste

En environnement prĂ©visible et en marchĂ© de conquĂȘte (aprĂšs 2Ăšme guerre mondiale), les silos ont Ă©tĂ© conçus pour dĂ©couper (spĂ©cialiser) afin de mieux piloter en segmentĂ©-sĂ©quentiel : « je fais ma part du travail et je vous passe le relais » comme sur une chaĂźne de montage - CQFD. Cela a bien fonctionnĂ© mais au fil du temps, les acteurs ont perdu de vue l’intĂ©rĂȘt commun et les silos sont devenus des fiefs et des domaines d’excellence technique se satisfaisant Ă  eux mĂȘmes. L'environnement, quant Ă  lui, s’est complexifiĂ©. Le marchĂ© dĂ©jĂ  concurrentiel s’enrichit des acteurs du numĂ©rique et les organisations sont soumises Ă  l’épreuve de la COVID 19. Ça signifie l'abandon du couple segmentĂ©-sĂ©quentiel au profit d'un attelage simultanĂ©-coopĂ©ratif : «  je vous intĂšgre dans ma part de travail et vous faites de mĂȘme dans la vĂŽtre. » Cet attelage suppose de mettre plutĂŽt en valeur des managers gĂ©nĂ©ralistes - dĂšs les 1ers niveaux - vs des acteurs spĂ©cialistes. A mesure que la complexitĂ© augmente, que chaque individu ne voit qu'une petite partie de l'environnement, nous avons besoin de gĂ©nĂ©ralistes, qui adoptent une vision - hors silo - et progressent par essai/erreur. Cette hauteur de vue gĂ©nĂšre souvent des idĂ©es qui ne peuvent ĂȘtre attribuĂ©es Ă  une seule expertise. Il faut se dĂ©barrasser de la croyance que seuls les experts et les dirigeants ont les bonnes rĂ©ponses. Un expert est performant dans son champ d'expertise (c'est-Ă -dire un ensemble qui peut ĂȘtre vaste, de situations connues). Mais cette profondeur Ă©troite peut l'empĂȘcher d'ĂȘtre crĂ©atif. Ça veut dire que de simples managers peuvent trouver des solutions Ă  des problĂšmes difficiles pour des experts. Un dirigeant, basant son analyse sur des modĂšles, peut avoir une rĂ©ponse thĂ©orique excellente mais totalement inadaptĂ©e sur le terrain. Des managers informĂ©s, responsabilisĂ©s, formĂ©s peuvent alors comprendre une situation sous plusieurs angles : stratĂ©gique, opĂ©rationnel (technique), financier, humain, commercial. Il y a des efforts de formation Ă  faire dans chacun de ses domaines. Ces gĂ©nĂ©ralistes dĂ©veloppent aussi plus facilement des compĂ©tences collectives : travailler en Ă©quipe nĂ©cessite des capacitĂ©s relationnelles que beaucoup n’ont pas aujourd’hui. Ces compĂ©tences collectives se fondent, avant tout, sur des relations de confiance. C'Ă©tait d'ailleurs la premiĂšre butĂ©e rencontrĂ©e par les managers quand il a fallu mettre en place le tĂ©lĂ©travail.


Quitter les silos ?

Aujourd’hui, l’entreprise par l'intermĂ©diaire de ses dirigeants ne mobilise pas le management de terrain sur les enjeux stratĂ©giques et ne relie pas leurs actions aux rĂ©sultats. C’est le grand pouvoir du management Command&Control : on fait les choses parce qu'il faut les faire. En cascade, le management de proximitĂ©, au prĂ©texte de pression et de gestion du temps, exerce lui mĂȘme un type de management oĂč il n'y a pas de place pour la mise en perspective de l'action et de l'expression des initiatives des collaborateurs. Comment amorcer le changement ? En reconnaissant la divergence initiale des visions. En Command&Control, les acteurs de terrain ont une vision « intĂ©rieure » lorsque qu’ils portent des jugements basĂ©s sur les dĂ©tails de leur projet particulier. Les dirigeants ont, quant Ă  eux, une vision « extĂ©rieure » basĂ©e sur des critĂšres Ă©conomiques, stratĂ©giques, structurels (processus, rĂšgles, etc.). Leurs dĂ©cisions sont aussi contraintes par le respect des rĂ©glementations et par les rĂ©sultats Ă  produire pour les actionnaires mais encore par la culture (valeurs opĂ©rantes, normes, croyances) de l’entreprise. Deux visions, deux perceptions qui peuvent ĂȘtre radicalement diffĂ©rentes. Cette divergence prive tout ce monde d'une estimation des besoins d'Ă©volution des compĂ©tences et d'informations essentielles Ă  l'amĂ©lioration de leurs performances dans un environnement post Command&Control. Quatre mots-clĂ©s Ă  repĂ©rer pour Ă©voluer : confiance, responsabilisation, informations, formation (et plus gĂ©nĂ©ralement accompagnement des managers et les collaborateurs). Si on quitte les silos, il faut en prendre la mesure et penser structure en rĂ©seau, qui fait circuler l'information sans restrictions. Ces structures moins hiĂ©rarchiques augmentent l'Ă©change d'informations et ajoutent considĂ©rablement Ă  la valeur de l'entreprise grĂące au partage des connaissances, elles augmentent Ă©galement la surcharge d'informations, qui suppose une descente des responsabilitĂ©s pour dĂ©cider, au plus prĂšs des acteurs du terrain. Il faut alors ĂȘtre psychologiquement Ă©quipĂ© pour accueillir le dissensus qui permet de trouver d’autres angles d’attaque d’une situation, faire participer tous les acteurs et ainsi en enrichir le sens avant de dĂ©cider. Un sens partagĂ© de la situation supporte mieux la coopĂ©ration entre dirigeants et managers. Or, la coopĂ©ration suppose une confiance entre ces deux niveaux.


La confiance

Ce qui va permettre la confiance des salariĂ©s (collaborateurs comme managers) dans les dirigeants, c'est que ces derniers autorisent l’open data (accĂšs libre aux donnĂ©es ) et pratiquent l'open book management ou le management Ă  partir du « livre de comptes ouvert ». Il donne Ă  chaque salariĂ© de l’entreprise, les connaissances requises sur les processus, les donnĂ©es financiĂšres. Ce sont autant d’élĂ©ments de comprĂ©hension qui mĂšnent Ă  un processus d'appropriation et d'Ă©valuation : ça donne de l'ouverture et des perspectives aux acteurs de terrain. Cette transparence dĂ©montre que leurs efforts se reflĂštent dans les chiffres de l'entreprise. Elle renforce l’évidence de la coopĂ©ration Ă©voquĂ©e car elle dĂ©veloppe un sens partagĂ©. C’est un cercle vertueux : la confiance stimule le moral et fidĂ©lise les meilleurs Ă©lĂ©ments. Ajoutons une centralisation et un accĂšs libre des donnĂ©es au niveau de l’entreprise (5): imaginez ainsi que les RH et le Marketing puissent utiliser les mĂȘmes donnĂ©es, aidĂ©s par des data scientists au service de tous ! La logique et la promesse de cette approche n’est pas, pour les acteurs terrain, de recevoir une solution mais d’apprendre Ă  changer ou d’apprendre Ă  rĂ©soudre une catĂ©gorie de problĂšmes, d’apprendre Ă  gĂ©rer diffĂ©remment un type donnĂ© de situations. Les bĂ©nĂ©fices sont Ă©vidents : des acteurs Ă©loignĂ©s, qui se voient peu Ă  cause du tĂ©lĂ©travail, partagent plus facilement une vision commune, s’ils ont un accĂšs large et facile Ă  toutes les donnĂ©es qu'il souhaitent. InformĂ©s, ils sont plus aptes Ă  changer vite et sont agiles au quotidien, Les missions sont mises en perspective, les discussions argumentĂ©es et basĂ©es sur des donnĂ©es. Ce qui permet des dĂ©bats constructifs et l'arrĂȘt des guerres de tranchĂ©es. Bien sĂ»r, comme dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© dans un prĂ©cĂ©dent papier, avoir des acteurs informĂ©s, ça signifie que les dirigeants doivent se prĂ©parer Ă  questions sur les stratĂ©gies qu'ils ont adoptĂ©es et/ou des revendications de participation plus forte aux bĂ©nĂ©fices (j’y reviendrai dans un prochain papier). Il est possible que ce questionnement passe encore pour un crime de lĂšse majesté 


Ce qui va permettre la confiance des dirigeants dans les salariĂ©s, c’est la capacitĂ© - prouvĂ©e - de ces derniers Ă  travailler Ă  partir des donnĂ©es et des dĂ©lĂ©gations claires de responsabilitĂ©s. S’ils rĂ©ussissent Ă  dĂ©passer la « simple » logique de leur mĂ©tier et lier leurs activitĂ©s au « business » voire Ă  des rĂ©sultats financiers, ils gagnent en crĂ©dibilitĂ© auprĂšs des cadres supĂ©rieurs. Ainsi armĂ©s, ils peuvent anticiper, proposer des scĂ©narios et des solutions plutĂŽt que simplement exĂ©cuter. Si les pĂ©rimĂštres d'intervention des uns et des autres sont relativement bien connus dans les fiches de poste, les niveaux de dĂ©lĂ©gations / dĂ©cisions le sont parfois moins parce que dĂ©pendant de chaque manager sans vraiment ĂȘtre nĂ©gociĂ©s : que dĂ©cider seul ? Que dĂ©cider avec des gens de l'Ă©quipe ? Que dĂ©cider avec son supĂ©rieur hiĂ©rarchique ? Que dĂ©cider avec des gens d'autres dĂ©partements en coopĂ©ration ? Etc. Cette rĂ©flexion est nĂ©gociĂ©e entre les dirigeants et les managers puis entre les managers et les salariĂ©s. La nĂ©gociation aboutit Ă  produire les rĂšgles du jeu dans chaque entitĂ© (Ă©quipe, dĂ©partement, entreprise).


Est-ce que ce scĂ©nario est rĂ©aliste ? Disons d'emblĂ©e que si les dirigeants ne l’approuvent pas, il est mort-nĂ©. Ensuite, il ne faut pas se tromper de façon de l'introduire et de le prĂ©senter. Remettre en cause les apprentissages du passĂ©, en apportant d'autres mĂ©thodes, c’est bien ; les imposer aux acteurs est Ă  la fois contreproductif et paradoxal (« soyez autonome »). Seul l’acteur concernĂ© peut dĂ©cider de dĂ©sapprendre ou pas une approche qu’il utilise souvent depuis plusieurs annĂ©es. Il y a ici un lien Ă  prendre en compte entre le niveau d’autonomie des acteurs et le type de collaboration utilisĂ©. Pour passer d’un niveau Ă  un autre (vers l’autonomie), des deuils sont Ă  faire. RĂȘver d’acteurs autonomes pour la beautĂ© de l'idĂ©e est Ă©videmment illusoire : par exemple, certains d’entre eux sont dĂ©pendants de la hiĂ©rarchie. Ils ont besoin d’ĂȘtre rassurĂ©es et ne sont pas aptes Ă  prendre tout de suite, des dĂ©cisions seuls. D'autres n'ont pas les capacitĂ©s cognitives idoines. Les changements de niveau ne s’acquiĂšrent pas par magie. Ils correspondent Ă  des Ă©volutions, ils demandent de la confiance (encore) en soi et une affirmation de soi. Un travail de dĂ©veloppement personnel de chaque acteur est utile pour amĂ©liorer son autonomie. Les managers ont ici une lourde de mission devant eux : ils devront favoriser le dĂ©veloppement de leurs collaborateurs, accepter plus de libertĂ© et donc Ă©largir leur propre zone de responsabilitĂ©.


(1) J’entends par « acteur » les managers et les collaborateurs Ă  l’exclusion des dirigeants.

(2) et (3) « La sociologie du changement », François Dupuy, 2011

(4) « Designing Complex Organizations » Jay Galbraith, 1973

(5) Voir Erwan Hernot "How Data Could Change The Power Distribution" sur le blog de ClavaConsulting https://www.clavaconsulting.com/

Photo : Yuri Catalano

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