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  • Photo du rédacteurErwan Hernot

Avec la Covid, l'intelligence émotionnelle est, plus que jamais, la condition du succès !


Pourquoi aborder le concept de l'intelligence émotionnelle dans ce papier alors qu’il existe depuis près de 30 ans ? Parce qu’il est à la base de bonnes relations interpersonnelles, elles mêmes à la base de la coopération, laquelle est plus nécessaire que jamais (voir à cet égard ici). Deux raisons (au moins) l’expliquent : la transformation de l’environnement des entreprises et la pandémie.


L'économie transactionnelle (le travail vu comme une simple transaction contre salaire) s’était concrétisée au début du XXe siècle, avec la logique taylorienne et fordienne : définition minutieuse des opérations et des tâches, organisation strictement planifiée, absence de communication horizontale entre opérateurs. Aujourd’hui, la nouvelle vague d’automatisation, l’omniprésence annoncée des algorithmes et la multiplication des procédures formalisées consolident apparemment cette économie transactionnelle et limiteraient l’intervention humaine à la conception des systèmes et à leur surveillance. Dans la production, les algorithmes prendraient tout le pouvoir. À y regarder de plus près, le mode transactionnel étend son influence mais à automatisation et procédures égales, les performances dépendent de plus en plus de la qualité des relations (ouvertes, interpersonnelles, dialogiques) entre les acteurs. D’ailleurs, les tâches préservées de l’automatisation sont celles qui requièrent de la créativité, du sens artistique, du contact humain, qu’elles se rapportent à un métier manuel ou intellectuel, peu ou bien qualifié. Les métiers peu automatisables impliquent de prendre des décisions dans la complexité. L'intégration croissante des systèmes techniques augmente leur fragilité et aboutit à la même conclusion : la véritable source de l’efficacité est relationnelle. Les entreprises - industrielles - ont commencé à comprendre cela au cours des années 1980. La « bascule » a eu lieu plus tard, lorsque les systèmes techniques ont franchi un certain seuil de complexité et lorsque la concurrence (se battre pour un client) a obligé les entreprises à mettre au premier rang des critères dits « hors coûts », comme la qualité. Or, l’interdépendance est fondamentale pour satisfaire le client et le résultat de l’action à mener pour cette satisfaction n’est pas connu d’avance. C’est une interdépendance d'équipe : ses membres doivent conjointement diagnostiquer et résoudre des problèmes. Leurs tâches nécessitent un haut niveau de synchronisation, de communication et de coordination, voire de créativité. Ce type d'interdépendance suppose une coopération où chacun peut venir sur le territoire de l'autre afin d'anticiper sur ce qui va suivre, en continuant ce qui a été effectué et en évitant toute rupture dans l'action présente. Ce qui suppose un bon niveau d’intelligence émotionnelle. Traduisons par la capacité à comprendre ses propres émotions et celles des autres, à reconnaître les effets significatifs des émotions et à utiliser ces informations pour adapter son comportement face à une situation donnée et rendre ainsi intelligible cette situation parfois complexe, comme un manager, dans une pandémie, face à des équipes hybrides. La distance accentue les problèmes relationnels, managériaux existant déjà sur le lieu de travail.


Le prochain gisement de croissance ?

La mise en avant de l'intelligence émotionnelle devient encore plus évidente dans la période que nous vivons. Le manager doit pouvoir accueillir et mettre en mots les émotions. Ce qui va permettre de mieux appréhender les déclencheurs responsables de ces dernières. Mais ça, c'est le langage d'un consultant. Un patron d'entreprise, qui prend conscience de l'importance du relationnel et des interdépendances, vous dirait plutôt la chose suivante : « La croissance de la rentabilité a été conséquente grâce à des méthodes telles que la ré-ingénierie (re-engineering en français ;) et l’accélération du cycle de traitement des nouveaux produits. Mais même avec de gros succès, la courbe d'amélioration s'aplatit au bout d’un moment. Où se trouve le prochain gisement de croissance compte-tenu de la situation ? Dans la nécessité de mieux utiliser les employés - maximiser les atouts humains - pour faire remonter la courbe. Il faut rendre l'entreprise plus intelligente sur le plan émotionnel ». Et ça commence par les managers à qui on demande souvent d’être positifs afin d’actionner un levier motivationnel pour l’équipe. Au-delà de l'incantation, qu'est-ce que ça signifie ? Le manager doit être capable de se motiver. C’est à dire reconnaître puis rassembler ses émotions au service d'un objectif. Cette capacité est, d'une certaine façon, la mère de toutes les autres facettes de l’intelligence émotionnelle : la conscience de soi - reconnaître un sentiment tel qu'il se produit. La capacité d’attention à ses sentiments et leur évolution est cruciale pour la perspicacité psychologique et la compréhension de soi même. Une incapacité à remarquer ses vrais sentiments laisse le manager à leur merci. Les peurs et les freins qu’il ne reconnaît pas sont souvent transmis à son équipe. La colère, la culpabilité, l’anxiété peuvent évidemment troubler ses relations et altérer ses choix. Les managers qui ont une plus grande certitude quant à leurs sentiments sont de meilleurs pilotes de leur quotidien, ayant une idée plus sûre de ce qu’ils ressentent vraiment à propos des décisions à prendre. Les émotions ainsi maîtrisées impactent la performance individuelle et collective. Le manager est authentique dans sa posture et ça sonne juste auprès de son équipe. Il est assertif dans ses messages, mieux compris par son équipe et en meilleure position pour gérer, voire désamorcer les conflits. Par exemple, il travaille facilement sur l’exactitude des mots utilisés afin d’exprimer au mieux ses besoins et ses attentes. Par exemple 2, s’il doit faire un feed-back négatif à un collaborateur, il le fait sans jugement, simplement en restant factuel et en exprimant ses attentes pour la prochaine fois. Au total, le manager émotionnellement intelligent rassemble une énergie émotionnelle au service de la mise en œuvre de la stratégie choisie par les décideurs.


Intégrer l'intelligence émotionnelle dans l'entreprise ne se fait pas sans friction

Trois raisons fondamentales entretiennent ces frictions :

  • La formation des dirigeants a traditionnellement mis l'accent sur la pensée du cerveau gauche. Appelons la, version 1.0. C'est le raisonnement déductif, la résolution analytique de problèmes et l'ingénierie de solutions. Il semblerait que (1) le premier tiers des programmes de MBA américains, très centré sur les compétences analytique, opérationnelle et financière, détruise même de l'intelligence émotionnelle ! Je fais le pari que les grandes écoles d’ingénieurs ou les « business schools » françaises sont très proches de ce constat. Les étudiants US possèdent moins d’intelligence émotionnelle en quittant - diplômés - le MBA, qu'ils en avaient en arrivant… En toute logique, les qualités recherchées chez les managers et collaborateurs (2) pour compléter ces caractéristiques de dirigeants sont par ordre d’apparition : 1. obéissance, 2. empressement à exécuter, 3. connaissances et capacités intellectuelles, 4. initiative, 4 créativité et 6. passion (nécessaire pour s’engager). Dans un monde de plus en plus turbulent, de nouvelles compétences cognitives seront nécessaires, en plus des qualités de la version 1.0. Celles-ci (version 3.0) incluent l'apprentissage en double boucle (3), la pensée systémique, le design thinking, la résolution créative de problèmes. Les qualités demandées aux managers et aux collaborateurs changent : 1. passion, 2. créativité, 3. initiative, 4. connaissances et capacités intellectuelles, 5. empressement à exécuter et 6. obéissance. Inutile de dire qu'on ne manage pas des collaborateurs 3.0 passionnés, créatifs, entrepreneurs etc. avec des dirigeants 1.0. Il est préférable d’être doté(e) d’une intelligence émotionnelle affutée.

  • La plupart des dirigeants et managers mettent en avant les capacités d'intelligence émotionnelle mais les process organisationnels et les systèmes les contredisent. On ne le mesure pas mais le coût social de la surdité émotionnelle est probablement ahurissant. Ainsi, la distance fonctionnelle bien installée dans les silos, génère déjà en présentiel, des appréhensions différentes d'un même problème : chaque métier a sa propre vision. Le manager va devoir développer des outils de désamorçage, prenant en compte que « l’autre n’est pas moi » (sans pour autant être l’enfer ;). D’où l’importance de faire fonctionner son intelligence émotionnelle ; ici son empathie : comment aurais-je réagi dans sa situation ? Qu’aurais-je dit à sa place ? Ce qui veut dire qu’il a conscience qu’il réagit avec son système de croyances, de valeurs et d’expériences propres. L’objectif est de rester à l’écoute et ouvert aux idées différentes, d’avoir la capacité de revoir ses positions, de se remettre en cause à tout moment.

  • Enfin, l’usage actuel intensif des Zoom et autres TEAMS a tendance à inhiber le développement de cette intelligence émotionnelle parce qu'il rend plus rare le face-à-face physique. Il est plus difficile de reconnaître les émotions des autres et de voir/ressentir leurs manifestations physiques à travers un écran.

Fortes de ce constat, que peuvent faire les entreprises ? Au-delà de la prise de conscience, combien ont mis des moyens sur la table pour intégrer cette donnée dans l’équation de la performance ? Beaucoup… lorsqu' il s'agit maintenant de recruter des PDG ou des membres du comité exécutif ! A ce niveau de poste, les chasseurs de têtes savent - normalement - maintenant que dans une économie relationnelle, le prix de la « surdité émotionnelle » évoquée dans ce papier est très dommageable pour l'entreprise. Ils cherchent plutôt des profils 3.0. On peut espérer un effet de cascade. Ces dirigeants repéreront et promouvront des manager(e)s également 3.0. Ceux qui qui font preuve d’empathie, ont des qualités relationnelles et osent s’appuyer sur leur intelligence émotionnelle pour se mettre à l’écoute de leur équipe, collègues ou clients. Les entreprises vont intégrer la complémentarité des 2 intelligences pour améliorer l'innovation et le business. La période de la pandémie devrait accélérer le mouvement.


Trois déclinaisons possibles pour ce papier :

Webinaire : « Intelligence émotionnelle et posture du manager », sensibilisation. Durée 1h00

Formation distancielle : « Intelligence émotionnelle et posture du manager » approfondissement. Durée 0,5 jour

Conseil de mise en oeuvre individualisé : « Intelligence émotionnelle et posture du manager » application. Durée sur mesure

Contactez moi sur LinkedIn (Erwan Hernot) ou à info@clavaconsulting.com


(1) The EI Advantage, Harvard Business Review Analytic Services, Research Report, 2019

(2) Gary Hamel What matters Now, 2012

(3) J’ai traduit ici le double loop learning de Chris Argyris dans Teaching Smart People How To Learn, article de la Harvard Business Review, May 1991. Ci-dessous le principe en schéma (Wikipedia) : la double boucle signifie essentiellement que l'auteur de la décision revoit également son modèle mental. Cette capacité suppose une forte intelligence émotionnelle.



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