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  • Photo du rédacteurErwan Hernot

Avec les données, le Command & Control est dépassé

La production des données renforce la présence continue, renseignée du client dans l’entreprise et accélère ainsi la mutation du management qui doit dépasser les anciens principes du Command & Control.

A l’ère industrielle, l’entreprise conçoit, fabrique et vend un produit à un client. Après l’achat, au delà d’une éventuelle maintenance (pour certains produits), ce client disparait des écrans radar de cette entreprise. Sans cet aiguillon, elle vit sur sa propre logique et s’accomode fort bien des silos et d’un mode de management issu des principes du taylorisme. La situation change aujourd’hui. Applications métiers (comme les ERP, CRM), plateformes, réseaux sociaux et capteurs intégrés au produit génèrent des données sur les usages de ce produit. Elles “incarnent” ainsi le client, qui reste toujours présent dans l’entreprise et met sous tension les équipes : elles doivent alors vite élaborer les réponses ad-hoc à ses problèmes et ses demandes.


De l’expérience client à l’expérience employé


Imagination d’une solution client ad-hoc et vitesse d’exécution supposent des équipes, créatives, solidaires et responsabilisées c’est à dire motivées. Encore faut-il ne pas se tromper de facteurs de motivation. Or, à l’ère industrielle, pour caricaturer, les managers résument le travail à son contrat et considèrent que les récompenses monétaires, les contraintes et les sanctions constituent les bases du management : le collaborateur se comporterait majoritairement en fonction de ces éléments. Cette perception était pertinente dans les usines de production de masse. Elle se heurte aux évolutions technologiques qui accélèrent la mutation de l’entreprise de lieu de production à un lieu d’échanges et de coopération parce que sa matière première devient l’information et sa mission, sa mise en valeur. C’est exactement le cas avec les données qui concrétisent l’expérience client parce qu’elles permettent de la mesurer. Elle prend ainsi tout son son sens et fait advenir logiquement « l’expérience employé ».

Une organisation repensée


Les managers adaptent d’abord l’organisation pour mieux satisfaire le client. C’est un puissant moteur de changement car l’évidence de ses besoins est documentée. Il provoque même une inversion de l’ordre d’importance des acteurs de l’entreprise: d’abord viennent les clients puis les collaborateurs à leur contact – donc susceptibles de le satisfaire – puis tous les autres (supports divers et variés)… hiérarchie comprise. Il remet encore en cause la structure si familière du silo dont n’a que faire le client. Une bonne expérience client dépend étroitement d’une expérience employé elle même satisfaisante. Celle-ci est conditionnée à un meilleur engagement des collaborateurs : les managers sont – eux aussi – en tension et sommés d’activer les facteurs déterminants de cet engagement :

  1. La sensation de bien maîtriser son métier. Elle reste d’autant plus fondamentale qu’arrive le partenariat avec l’IA. Aidé par son manager, le collaborateur repense sa palette de compétences et apprend à relever des nouveaux défis dans son travail.

  2. Le sens de ce qu’on fait est encore plus important quand les tâches routinières sont confiées à l’IA. Aux dirigeants ici d’inclure le travail dans une raison d’être qui le dépasse… sans verser dans la facilité de la langue de bois corporate et de ses slogans interchangeables. Chaque collaborateur est alors capable de dessiner la perspective entre son travail et la logique d’ensemble.

  3. Le sentiment de progresser et le désir d’aller de l’avant. Le partenariat avec l’IA oblige le collaborateur à franchir des étapes significatives dans sa montée en compétences. Au manager d’encourager et de reconnaître cette croissance professionnelle.

  4. Le désir d’être autonome, de pouvoir choisir son mode de travail, de prendre certaines décisions. L’IA donne des moyens (exploitation des données, pré-validation de certaines décisions par la machine, souplesse de travail) au collaborateur de NE PAS faire appel à son manager. A lui d’abord de concevoir un cadre et des principes qui guident le collaborateur. Ce dernier est alors évalué sur la compréhension qu’il en a et l’application qu’il en fait. Une fois cette compréhension acquise, le manager lui fait confiance pour ajuster comportement et pratiques professionnelles selon les situations dans lesquelles il se trouve. Cette liberté va de pair avec la responsabilité effectivement exercée par le collaborateur sans en référer à un quelconque chef.

Décisions au plus près du terrain


Les décisions se prennent alors sur le terrain. Les équipes au contact des clients sont les mieux à même d’interpréter intelligemment les données. Par exemple : un client ramène pour la deuxième fois dans un magasin de bricolage un produit défectueux. Face à lui, le vendeur a toutes les informations sur son terminal : historique des achats, fréquence, montants, contributions sur les forums “bricolage” hébergés sur la plateforme de la marque… En mode management Command and Control, il fait appel à son manager pour traiter le cas : “Attendez, je me renseigne auprès du responsable”. Extrait d’un autre problème, ce manager doit 1. se plonger dans ce nouveau contexte, 2. prendre connaissance du problème sur le terminal du vendeur, 3. évaluer la solution, 4. décider devant le vendeur et le client qui attendent. C’est du temps perdu et une piètre image de la marque. En mode Agile, le vendeur comprend tout de suite à l’examen des données qu’il faut faire un geste commercial (offrir un bon d’achats, rembourser…) Sa réaction rapide et appropriée rend l’expérience client positive (“on m’a compris très vite”). Cette satisfaction du client, exprimée, valorise et renforce encore la motivation du vendeur.


Face à ce collaborateur responsabilisé, capable, par ses décisions de créer littéralement de l’image de marque et comprenant de mieux en mieux la chaîne de valeur client, le modèle managérial du Command & Control apparaît étroit, simpliste et dépassé.


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