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Expérimentation plutôt qu'expérience ?

Photo du rédacteur: Erwan HernotErwan Hernot

Afflux de données et applications disruptives, économie de plateformes : les nouveautés peuvent être radicales. Dans cet environnement complexe, la façon de conduire le business change. Elle fait appel à un nouveau profil de collaborateur alliant humilité, pensée critique et adaptabilité.


Capital savoir obsolète

Rapide retour sur un passé récent. Les collaborateurs accumulaient alors de l’expérience et visaient – pour les plus ambitieux - l’excellence individuelle. Leur expertise était valorisée par cette expérience : l’important était d’avoir raison. Le collaborateur progressait sur une sédimentation successive de certitudes. L’avènement de l’intelligence artificielle rendue possible par l’afflux des données, rend ce capital « savoir métier » rapidement obsolète. Pour mémoire, un ingénieur informatique sortant de l’école doit se remettre à jour au bout de 6 mois. Au delà de l’informatique, certaines bonnes âmes pourraient objecter que les autres métiers changent peu. C’est évidemment oublier que tous sont touchés par l’arrivée des IA (embarquées pour les plus communes d’entre elles dans les systèmes experts tels que les ERP, CRM, etc.) Si le savoir métier change et est intégré en partie dans la machine, que reste-t-il au collaborateur avisé ? Il se repositionne en apprenti permanent face aux situations de travail que l’IA ne peut pas traiter. Cette posture suppose une valeur ajoutée. Elle a pour nom ici : adaptabilité, esprit critique et humilité afin de produire un raisonnement de qualité, clé de son employabilité.


Apprentissage permanent

Plus que l’expérience, le collaborateur valorise maintenant l’expérimentation. C’est elle qui permet d’obtenir de l’information qu’il avait ignorée ou sous estimée dans sa pratique professionnelle. Elle peut déboucher sur des conclusions contre intuitives et l’oblige à penser hors du cadre. Dans ses domaines de compétences, il casse ainsi ses propres certitudes. Son identité professionnelle se redéfinit en fonction de ses apprentissages : ce n’est plus une logique de statut mais une dynamique de progrès. Ce qui suppose l’acquisition d’un ego souple. Il admet ainsi ses incertitudes et son ignorance sinon il n’apprend pas ! Mieux : il ne les cache pas aux autres et apprend d’eux. C’est un collaborateur à la fois humble et « augmenté ». Se fiant à l’examen des données, il sait qu’il va affronter des nouveautés. Par conséquent, Il pose plus de questions, il compare, connecte, explique et relativise les savoirs et ceux qui les détiennent, y compris lui même. Il devient plus attentif à la rigueur de son raisonnement.


Toute hypothèse est une croyance

Or, tout raisonnement est d’abord basé sur des hypothèses c’est à dire des croyances qu’on soutient sans beaucoup de réflexion. Le collaborateur s’oblige à régulièrement évaluer ses propres croyances en les confrontant aux données, aux informations qu’il en tire et qui peuvent constituer autant de preuves ou de nouvelles perspectives, avant de planifier un plan d'action. Faire preuve d'humilité intellectuelle le rend réceptif aux collègues qui pensent différemment. Cette ouverture facilite à son tour l’adaptation, la créativité et la collaboration : ce collaborateur est apprécié et respecté par les autres parce qu'il valorise leurs apports respectifs sans rechercher d’emblée LA vérité. La rigueur de son raisonnement le rend toutefois capable de défendre sa position sans rechercher les soutiens d’une hiérarchie ; il n'abandonne pas sous la pression s’il a les éléments prouvant la validité de ce qu’il avance.


L’irruption du big data et son corollaire l’intelligence artificielle change la logique de la performance dans de nombreux métiers. L’important n’est plus la réponse qu’apporte le collaborateur mais la question qu’il pose.


Photo : Polina Tankilevitch


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