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"Rationaliser" : que se passe-t-il si on supprime une couche managériale ?

Photo du rédacteur: Erwan HernotErwan Hernot

Une entreprise, c'est un système
Supprimer une couche managériale

Lorsqu'une entreprise envisage de supprimer une couche de management intermédiaire, elle est souvent motivée par le désir de rationaliser les opérations, de réduire les coûts et d'accroître l'agilité organisationnelle. Cependant, la vie n'est pas aussi simple ! Les entreprises sont des systèmes complexes dans lesquels les changements d'une partie peuvent avoir des effets d'entraînement sur toute la structure. Ces conséquences dynamiques ne sont souvent pas entièrement anticipées par la direction, laquelle se trouve face à des défis inattendus voire des revers potentiels. Scénario noir ? Assurément ! Mais la démonstration a valeur pédagogique.


Lorsqu'une couche de management intermédiaire est supprimée, les managers de la couche supérieure se retrouvent évidemment responsables d'un plus grand nombre de collaborateurs. Mais étonnamment, cette conséquence n'est pas toujours analysée. L'extension du périmètre de contrôle amène une surcharge managériale, dans laquelle ces managers ont du mal à fournir des conseils, un soutien et une supervision adéquats à une équipe désormais élargie. La qualité de la prise de décision et du leadership peut se dégrader, ce qui entraîne une baisse des performances de l'équipe et conjointement une baisse du moral de ses membres. L'extension du périmètre de contrôle exige donc que les managers soient plus compétents et efficaces dans leurs rôles. Or, ce n'est pas livré avec ;) L'entreprise aura besoin d'investir dans des formations et/ou de recruter des managers plus expérimentés, ce qui augmente nécessairement les coûts. Est-ce prévu ? Les gains d’efficacité attendus de la réduction des niveaux managériaux seront pourtant contrebalancés par ces nouveaux défis et dépenses.


Parallèlement, la suppression d’un niveau managérial suppose une plus grande délégation de responsabilités à ceux du niveau inférieur. Si cela donne plus de pouvoir aux collaborateurs et conduit à une prise de décision plus rapide, ces derniers subissent également une pression supplémentaire. S'ils ne disposent pas des compétences, de l’expérience ou du soutien nécessaires, la qualité du travail en souffre, ce qui entraîne des erreurs, des inefficacités et … une augmentation des coûts. Ajoutons un possible besoin d’outils de gestion plus sophistiqués pour suivre et soutenir cette délégation qui érodera les économies de coûts prévues. Une délégation sans soutien approprié peut mener à un épuisement professionnel chez les collaborateurs, s’ils ne sont pas suffisamment préparés à leurs nouvelles responsabilités. A la clé : un taux de rotation des personnels plus élevé, ce qui perturbe encore plus les opérations et augmente les coûts de recrutement et de formation.


Prenons le bon coté des choses : la réduction du nombre de niveaux de gestion peut, en théorie, améliorer l’agilité organisationnelle en permettant aux informations et aux décisions de circuler plus rapidement. Mais cet avantage n’est pas garanti. Les managers intermédiaires jouent un rôle crucial dans le filtrage des informations et la prise de décisions qui évitent aux dirigeants d'être submergés. Sans ce niveau, ils risquent de se retrouver inondés de détails et de décisions qui étaient auparavant gérés par la couche intermédiaire. Le risque du goulot d’étranglement au sommet est patent. S'il est avéré, il ralentira la prise de décision et réduira l’agilité globale de l’organisation. En raccourci, on débouche sur un paradoxe : la suppression des managers intermédiaires conduit à une situation dans laquelle l'entreprise devient moins agile parce que la direction devient un goulot d’étranglement ! Pour atténuer ce problème, l'entreprise aura besoin d’établir de nouveaux processus ou d’embaucher du personnel supplémentaire en soutien ; ce qui augmentera la complexité et les coûts. Sans compter que les dirigeants s’impliqueront davantage dans les questions opérationnelles, ce qui les détournera des initiatives stratégiques. En conséquence, l'entreprise ratera des opportunités et réduira ses chances de succès long terme. Dans le même ordre d'idées, avec moins de niveaux entre la première ligne et le sommet, les dirigeants seront tentés d'intervenir dans les opérations quotidiennes. Certes, c'est un moyen de rester connecté à l’entreprise. Mais du point de vue des managers de première ligne, c'est une toute autre interprétation : le micro-management guette. L’autonomie et la motivation diminuent. A terme, le phénomène peut également créer une culture de dépendance où les managers de première ligne sont moins habilités à prendre des décisions. Au fil du temps, cela affaiblit l’efficacité globale de l'entreprise et conduit au désengagement des employés, ce qui complique encore davantage les efforts visant à maintenir ou à améliorer les performances.


Dans une tentative de garder le contrôle et de compenser la perte de managers intermédiaires, les dirigeants peuvent aussi créer de nouveaux niveaux de fonctions support ! Ces fonctions, bien que destinées à rationaliser les opérations et à maintenir la surveillance, alourdissent la bureaucratie et ralentissent les processus de prise de décision. Ce gonflement contrebalancera les avantages supposés de la réduction des niveaux managériaux, ce qui entraînera des coûts plus élevés et une flexibilité réduite. Il y a alors un risque de confusion lorsque les collaborateurs tenteront de s'y retrouver dans les nouvelles structures. La simplicité et l'agilité prévues au départ par les réductions des niveaux managériaux est désormais hors d'atteinte.

Au fil du temps, cela érodera la confiance et le moral au sein des équipes, car les collaborateurs ne retrouveront pas les avantages promis du changement !


La suppression d’un niveau de management intermédiaire dans une entreprise n’est pas seulement une simple mesure de réduction des coûts. Elle a des conséquences profondes et systémiques qui se répercutent dans toute l'entreprise. La direction doit examiner attentivement cette dynamique, en reconnaissant que les changements apportés à une partie du système affecteront inévitablement les autres. Sans cette compréhension globale, les avantages escomptés sont compromis par des conséquences inenvisagées, conduisant à une situation dans laquelle l'entreprise est moins efficace, plus coûteuse et en fin de compte, moins compétitive.


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